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Blankass. Un nom qui sonne. Comme blanc-cassis ? Pour évoquer les bords de comptoirs, enfumés et grisés, où ils ont longtemps fait résonner leur musique. Comme blanc cassé ? Pour parler d'un monde ou rien n'est jamais ou tout noir ou tout blanc. Un nom pour casser les barrières entre les gens ou pour parler de leurs fêlures ? Qu'importe, finalement. Un nom est un nom et une rose, on le sait, se parant d'un tout autre nom serait encore la même. Car l'essentiel est bien tout ce qui, au fil du chemin, va emplir et faire vibrer ce mot : BLANKASS.

Du punk à l'accordéon.

Un groupe de rock composé de 6 garçons. Du Berry et d'ailleurs. Car leur univers est bien plus vaste que cette campagne berrichonne où l'on a si souvent voulu cantonner et enfermer leur musique. Le petit dernier, Nico, guitariste discret au sourire toujours à fleur de lèvres ; l'impénétrable bassiste, Bruno, ayant sévi par le passé au sein d'un groupe nommé les Shredded Ermine's : un groupe au rock assez sombre, voire cold ; il aime Nick Cave ou Jeff Buckley et donne à Blankass son côté un peu "dark". Il y a Olivier, le batteur, un spectacle à lui tout seul - en sueur et en transe à chaque concert - , mais bosseur acharné surtout, dont le hobby est de voyager dans sa tête. Non, vous n'êtes pas projeté dans un de ses rêves ; flûtes, pipeaux et saxos sont eux aussi du combat et réchauffent et humanisent ce rock, sous le souffle de Philou (qui vient, lui, de la musique pour enfants).

Et puis, il y a les 2 frères Ledoux : Guillaume au chant et à l'accordéon, et Johan à la guitare. Ok, ok, ces deux-là sont tombés dans la marmite lorsqu'ils étaient petits, ont écumé (bon gré, mal gré) les festivals folks avec leurs parents ; étaient punks à 8 ans et sont passés avec leur groupe, Zéro de conduite, en première partie de Gun Club, en 83, lors du Printemps de Bourges ; ont interviewé Gainsbourg en 86 (Guillaume en était fan) et sorti un 33 Tour, en 88, où se révèle déjà, quoique encore incertaine, l'âme de leur futur groupe.

Retrouver un peu d'humanité.

En 90, fini le "No futur", Guillaume tombe amoureux d'un vieil accordéon et décide d'en sauter, plus que d'en jouer !, et d'en faire un véritable allié sur scène, pour électriser un public qui ne rechigne jamais à jumper. Six caractères forts et différents sont désormais prêts à devenir frères et à s'embarquer dans l'aventure Blankass, bien décidés à courser, de haut en bas, de long en large et en travers, toutes les scènes de l'hexagone (des bars Pmu aux grands festivals). En 1995, force est de constater que les chansons s'accumulent et qu'il est temps de graver ces morceaux de vie sur cd .

L'album éponyme sort cette même année et c'est sur scène seulement, en entendant de plus en plus de monde scander les refrains de "Maria", "Monseigneur" ou "Léon", qu'ils prennent conscience de leur succès. Un succès qui culmine avec le passage sur nos bandes fm du titre phare de l'album : "La couleur des blés", un hommage au Petit Prince de Saint-Ex ; mais aussi, en février 97, avec une nomination dans la catégorie "révélation de l'année" aux Victoires de la Musique et l'obtention du prix Roger Seiller de la Sacem. Et l'année suivante ne sonne pas le glas, car ils sont de nouveau nominés - dans la catégorie "groupe de l'année" cette fois -, aux côtés, entre autre, de Noir Désir.

Mais il n'y a rien d'étonnant à ce que cet album touche si fort et si bien les gens : tout simplement parce qu'il parle d'eux. De nous. Des tranches de vie quotidienne, des amours malheureuses ("Maria", "Celui que j'aime"), des piliers de bistrot ("Léon"), des croyances qui s'effondrent et des religions qui pervertissent ("La colère des dieux") ; mais aussi, on y trouve une certaine nostalgie du passé ("Qui se souvient"), un passé où se trouve encore, comme un trésor, une fraternité perdue. Entre rire et larmes, ses personnages souvent déchus, mais toujours attachants, nous font entrer - le sourire aux lèvres et le coeur sur la main - dans leurs histoires, comme on ouvrirait un vieux livre de légendes des pays d'"Il était une fois".
Les thèmes du passé, de l'enfance, de la difficulté de vivre dans ce monde moderne - si pressé et trop artificiel, qui nous fait oublier l'essentiel ("La couleur des blés") - font de ce Blankass un album pur et simple, sincère ; un instantané du vécu de jeunes gens qui savent déjà que la musique, les chansons sont des armes imparables (dixit Guillaume) pour toucher les gens et les réveiller.

L'Ere de rien ?

Et maintenant que l'heure du réveil a sonné, Blankass peut "envoyer la sauce", saturer ses guitares de rage et de venin ; asséner ses propos revendicatifs et acérés : ce sera L'Ere de rien, titre du second opus. S'ensuit une tournée marathon d'un an qui, malgré le mauvais vouloir de leur maison de disques de l'époque - Universal -, remplit les salles et élargit et fidélise leur public.
Avec L'Ere, ils affirment leur engagement social, se battent avec leurs mots et leur musique contre toute forme d'exclusion - que ce soit dans "Pas des chiens" qui parle du racisme et de la difficulté de vivre, parqué dans les cités ; ou dans "D'où je viens", une chanson contre la stigmatisation des personnes trisomiques - et continuent de vouloir vraiment faire se rencontrer les gens (la sublime "Le fil de l'épée").
Guillaume l'a toujours proclamé : Blankass est avant tout un groupe de scène. Ce qui l'intéresse profondément, ce sont les rencontres live, le toucher, le palpable ; en chair et en sang, tous les sens en éveil.

La renaissance.

Le passage chez Universal en 1998 avait mal commencé. 4 années et un procès plus loin, Blankass a cassé ses liens et quelques guitares en moins, des bleus et des coups en plus, mais une volonté d'acier dans les veines ; ils reviennent, enfin, en 2003, avec leur troisième bébé : L'Homme fleur, image symbolique, s'il en est, de leur renaissance. Eux qui n'attendaient déjà que de retrouver la scène, à peine leur précédente tournée terminée, en 99 ; on imagine aisément l'ascétisme insupportable de cette séparation. Mais le passé est le passé et les Blankass sont prêts à tout reconstruire. Ils repartent de presque zéro - un noyau d'irréductibles est toujours là près d'eux - et c'est à la force des évadés qu'ils conquièrent leur nouveau public.

On sent clairement que ce troisième album marque une transition, amorce un tournant dans leur carrière. La rage noire et les corps de flamme de L'Ere de rien se sont faits plus sages. Les textes de Guillaume ont mûri, sont plus travaillés ; n'hésitent plus à user de la métaphore subtile plutôt que du coup de poing pour faire passer leur message. Ils sont plus intimes, plus dépouillés aussi, mais jamais ne les quitte ce besoin viscéral de parler des relations humaines, de la difficulté d'être avec l'autre. "L'enfer c'est les autres", nous dit Sartre ; Blankass ne se satisfait guère de cette fatale formule et cherche au contraire à apaiser les affres et les tourments de cet enfer, et à faire souffler un vent d'espoir ("Pour la lumière", "Sur la branche") sur l'avenir du monde.

Où que le vent nous porte, l'aventure continue.

Attendons maintenant de voir où ce vent les portera et nous portera. Avec 3 albums si différents à leur actif, il est difficile de présumer la teneur exacte de leur prochain opus ; une chose est toutefois plus que certaine : l'humain y aura toujours sa place.
A la vôtre les gars ! et au prochain combat... nous irons "voir pas si loin si [vous y êtes]".

Cynthia D.

Basse, guitare : Bruno Marande
Accordéon, Voix : Guillaume Ledoux
Guitare, Voix : Johan Ledoux
Guitare : Nicolas Combrouze
Saxophone, Flûte: Philippe Ribaudeau
Batterie : Olivier Robineau
Clavier : Cédric Milard
Guitare : Nicolas Bravin